Face aux violences faites aux femmes, « il faut…
Article publié par Ouest France le 22 novembre 2024
Grâce au travail porté par la Fondation Solacroup-Hébert, Dinard (Ille-et-Vilaine) est engagé dans la lutte contre les violences conjugales. La villa Ker Antonia est un lieu qui permet aux victimes de se reconstruire. « Il faudrait plus de maisons comme celle-ci », alerte l’avocate Marie Blandin, marraine de Ker Antonia.
« Quand on est une victime, on a parfois le sentiment de ne pas être légitime. C’est important d’être rassurée, de savoir que l’on n’est pas seule. » Sophie (1) a quitté son domicile il y a un an. Le père de ses enfants était violent. Loin de son ancienne vie, cette maman se reconstruit petit à petit à Dinard (Ille-et-Vilaine), à Ker Antonia.
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Un lieu unique en son genre, porté la Fondation Solacroup-Hébert et créé en 2021. Il accueille, loge et accompagne des femmes et leurs enfants confrontés à des violences conjugales et intrafamiliales. L’équipe, qui gère l’endroit, organise depuis trois ans, une série d’ateliers. « Les parcours Sensation’Elles permettent de tisser des liens avec différents interlocuteurs. Cela s’organise sur plusieurs journées et permet de libérer la parole, et cela fonctionne », insiste Marjorie Turuban, chargée d’accompagnement chez Ker Antonia.
Un tremplin pour se reconstruire
Les principales intéressées confirment l’utilité de ces temps d’échange. « Cela permet d’avoir une certaine clairvoyance sur des situations que nous avons vécues. De poser des mots sur notre histoire et d’être conseillées », reprend Sophie. Non loin d’elle, Chloé (1) a le même sentiment. « Cela fait presque trois ans que je suis à Ker Antonia. Cet endroit est pour moi un véritable tremplin et ces ateliers m’aident à avancer. »
Ker Antonia c’est aussi prendre conscience qu’il reste encore beaucoup de chemin pour aider les victimes des violences conjugales et intrafamiliales. Dans les tribunaux, toutes les semaines, les affaires s’enchaînent. En amont et en aval des procès, cela ne se passe pas toujours bien. Certaines femmes avouent « craindre » la justice, « redouter » de franchir la porte d’un commissariat.
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« Le problème, c’est la formation. Il reste encore beaucoup à faire dans ce domaine », alerte Marie Blandin. Avocate au barreau de Rennes et spécialiste des violences sexuelles et sexistes,elle a accepté d’être la marraine de Ker Antonia. « L’honneur est pour moi, le travail qui est fait ici est formidable », souligne-t-elle.
Un exemple à suivre même. Car pour l’avocate, il faut mieux accompagner les victimes. « Les délais des procédures, le manque d’échanges d’un étage à un autre du palais de justice… Nous sommes encore dans un système qui aboutit parfois à des situations dramatiques. L’audition des enfants est un bon exemple. La méthode Calliope, importée du Québec, n’est pas mise en place partout. Il y a parfois des décisions de justice paradoxales. Dans les commissariats, on rappelle très rarement que les victimes peuvent être assistées d’un avocat pour être accompagnées dans le dépôt de plainte. C’est un droit, mais cela ne rentre pas dans le cadre de l’aide juridictionnelle. Là aussi, il y a une aberration. »
Un appel aux dons
Marie Blandin pourrait poursuivre longtemps la liste des défaillances du système. Formations pluridisciplinaires ou sensibilisation de tout un chacun, la prise de conscience sociétale sur ce sujet est en marche. « Il y a des améliorations mais cela ne suffit pas. Il faudrait par exemple des maisons comme Ker Antonia partout en France », encourage la marraine.
Pourquoi est-ce que ce n’est pas le cas ? « Nous ne rentrons dans aucune case administrative, analyse Véronique Bléas, présidente de l’association en charge de Ker Antonia. Nous voudrions essaimer ce modèle ailleurs en France mais pour cela il faut de l’argent. Nous avons besoin de dons. » Pour ce faire, tout le monde peut aider. L’appel est lancé.
Plus de renseignements : https://fondation-solacroup-hebert.com/ker-antonia.
(1) Les prénoms ont été modifiés.